Les
hommes, le plus souvent, font Dieu à leur image, et succombent ainsi
à l'idolâtrie caractéristique du monde manifesté.
Pour
éviter ce piège, la tradition hébraïque interdit de prononcer le
tétragramme YHVH, et le remplace par un « nom substitué »
(Hachem « le Nom », ou Shaddaï
« Tout-Puissant » ou Adonaï « Seigneur »,
etc.). Seul le Grand-Prêtre du Temple de Salomon à Jérusalem
pouvait le prononcer, une fois l'an, à l'abri du voile du Saint des
Saints. Lorsque Moïse rencontre Dieu sur le Sinaï et lui demande
son nom, Il répond : Ehyeh
Acher Ehyeh
(Hébreu: אהיה
אשר אהיה)
qu'on traduit (mal) généralement par « Je suis qui Je suis »,
« Je suis celui qui est », ou « Je serai qui je
serai ».
Dans
l’Évangile, Jésus nous dit « Je suis la Voie, la Vérité
et la Vie : nul ne va au Père que par moi » (Jean
14,6) et aussi : « Nul ne connaît le Père, sinon le
Fils, et celui à qui le Fils veut bien le révéler ». Ce
n'est que par le Verbe, Christ, qu'on accède au mystère de l'Être
dont on ne peut rien dire, ténébreuse lumière. Maître Eckhart
pose la différence entre Dieu (Gott), le Dieu trinitaire
objet de dévotion, et la Déité (Gottheit), essence divine
inaccessible, « fond sans fond ».
« Il
est quelque chose au-dessus de l’être créé de l’âme, que ne
touche rien de créé, qui est néant, même l’ange qui a un être
pur, qui est pur et immense, ne le touche pas, cela n’a rien de
commun avec quoi que ce soit. Bien des clercs fameux ont trébuché
sur ce point. C’est une chose étrangère, c’est un désert,
c’est innomé plutôt que cela n’a un nom, c’est plus ignoré
que connu » (Maître
Eckhart)
En
islam, Dieu ne peut être représenté par une quelconque image tirée
du monde créé, et son nom même en arabe (Allah) n'est que l'un des
99 Noms divins qui sont ses attributs : Ar-Rahman « le
Miséricordieux », al-Haqq « la Vérité »,
al-Wahid « l'Unique », etc... En réalité, son
vrai nom est un secret, caché derrière ces attributs, et que le
parfait croyant doit chercher : « J'étais un trésor
caché, j'ai aimé être connu, alors j'ai créé les créatures »,
dit un hadith qudsi, où l'on reconnaît le ternaire martinésien
« pensée, volonté, action ». Là aussi, le visage que
Dieu montre aux hommes est son Verbe : c'est le Coran.
Qu'en
est-il du bouddhisme, où la notion de Dieu créateur n'existe pas ?
En effet, lorsqu'on interrogeait le Bouddha Sakyamuni sur les
origines du monde, il gardait le silence, le « Noble Silence ».
Ce n'est pas qu'il se désintéressât de la question, mais y
répondre risquait fort de conduire à une incompréhension plus
grande encore, et à l'instrumentalisation de la réponse. Le
bouddhisme mahayâna, plus tard, insistera sur la notion de shunyata
« vacuité-plénitude » et, finalement, interdépendance
et unité de l'être. La vraie nature des choses est shunyata,
et chaque être est en réalité cette vacuité-plénitude, réalisée
par le Bouddha sous l'arbre de l’Éveil. Chaque être recèle en
lui la « graine d'êtreté » qui est l'essence du monde.
Ainsi, si le bouddhisme semble athée, c'est qu'il ne veut pas même
évoquer le Divin, de peur qu'immédiatement cette notion soit
détournée du but (pécher, c'est manquer la cible). Une
interprétation bouddhiste de la shahada islamique pourrait
être : « il n'y a que la vacuité-plénitude qui soit ».
Quelques
développements dans ces articles Wikipedia :
et
aussi :
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