vendredi 28 février 2014

Pour un Rimé universel




Le mot Rimé est un mot tibétain (ris-med) qui signifie « non-sectaire ».

Le mouvement Rimé au Tibet :

Le bouddhisme a été diffusé au Tibet en deux vagues. La première, au VII° siècle de notre ère, sous le règne de Songtsen Gampo, qui épouse deux princesses bouddhistes, une népalaise et une chinoise. Puis, au siècle suivant, le roi Trisong Detsen (705-755) fait venir de l'Inde Shantarakshita, puis le maître indien Padmasambhava. Il rassemble des érudits et traducteurs, et fait traduire les textes traditionnels. Il institue une lignée d'enseignement et cache des « trésors spirituels » dans des endroits secrets pour l'avenir. Des monastères sont créés. Mais à partir de 838, le roi Langdarma persécute le bouddhisme. Quelques rares familles perpétuent ce bouddhisme ancien, qui donnera l'école Nyingmapa.

La deuxième vague commence en 1040 avec la venue du moine indien Atisha (983-1054). Son disciple Dromtönpa fonde l'école Kadampa. Le Tibétain Marpa le Traducteur (1012-1097) se rend en Inde et, de retour, transmet sa lignée à Milarépa, d'où provient l'école Kagyüpa. Drokmi Shakya Yéshé reçoit les enseignements tantriques de Virupa et les transmets à Khön Köntchok Gyalpo (1034-1102), qui fonde l'école Sakyapa.
Chacune de ces grandes écoles se subdivisera ensuite en plusieurs branches, qui diffèrent par leurs textes de références et leurs pratiques principales. Les frontières entre les écoles n'ont jamais été étanches. Cependant, l'institution monastique prend au moyen-âge une importance considérable. Les monastères deviennent des puissances politiques qui se disputent le pouvoir, nouant des alliances avec des puissances étrangères (dynasties mongoles, empereurs de Chine), et les rivalités politiques entre monastères finissent par durcir les oppositions religieuses entre les écoles dont ils dépendent.

Au XIX° siècle, le maître kagyüpa Jamgön Kongtrul Lodrö Thayé (1811-1899), rejoint par le maître sakyapa Jamyang Khyentsé Wangpo (1820-1892) et le maître nyingmapa Tchögyour Détchen Lingpa (1829-1870) fondent le mouvement non-sectaire (Rimé), dans le but de produire un renouveau spirituel, et de préserver l'existence des lignées spirituelles menacées de disparition, en recueillant leurs transmissions et leurs textes. Ils sont également rejoints par le maître bönpo1 Shardza Tashi Gyaltsen (1859-1934).

Reconnaissant dans toutes les écoles l'activité de l'esprit d'éveil (bodhicitta), ils prônent une attitude qui va au-delà de la simple tolérance œcuménique. Il s'agit d'une part de comprendre le sens profond des écrits et des pratiques des autres écoles, et d'autre part de préserver la diversité des voies et des écoles, en recensant et rassemblant tous les textes de toutes les écoles.

Le mouvement Rimé est à l'origine d'un extraordinaire renouveau de la spiritualité bouddhique au Tibet, moins d'un siècle avant l'invasion chinoise, dramatique et providentielle à la fois.

Jamgön Kongtrul Lodrö Thayé

Nous, juifs, chrétiens, musulmans, hindouistes, taoïstes, bouddhistes, et adeptes d'autres religions authentiquement issues de l'Esprit saint (nous pensons par exemple aux Jaïns et aux Sikhs de l'Inde ou aux Baha'i et aux Parsis de l'Iran), reconnaissons pleinement la validité de toutes ces voies qui conduisent les hommes vers la Vie, l’Éveil et le vrai Bonheur, dans cette vie et au-delà.

Nous savons que, dans chaque tradition de l'humanité, plusieurs mentalités coexistent. Certains considèrent que leur propre religion est la seule valable, qu'elle est la parole unique de Dieu ou l'expression finie de l'Absolu, et que tous les hommes sont appelés à les rejoindre, parfois de gré ou de force. Certains autres, plus ouverts, tiennent leur propre tradition pour la meilleure qui soit, mais tolèrent l'existence d'autres voies, dans l'espoir de voir ces « infidèles » se convertir. A l'inverse, d'autres relativisent leur foi à un point tel qu'ils pensent pouvoir prendre ici ou là ce qui les intéresse, dans un syncrétisme de bric et de broc sans cohérence.

Refusant les deux extrêmes de l'exclusivisme et du syncrétisme, considérons que l'Esprit s'adresse providentiellement à tous les hommes, depuis toujours, dans la langue qu'ils parlent, et selon le contexte historique, géographique et culturel du moment. Des hommes de valeur entendent cette voix, et tentent d'en transmettre le message et les enseignements dans le cadre de traditions diverses et adaptées aux besoins des hommes. Cette diversité est un bienfait pour l'humanité, elle doit être préservée, transmise et enrichie par les pratiquants spirituels de tous les peuples.

Cette multiplicité des traditions cache et révèle à la fois l'unicité de la Vérité Ultime. Comme le moyeu immobile d'une roue, la Vérité est commune à tous et ne se révèle qu'au terme d'un cheminement qui, finalement, est propre à chaque homme.

Appelons, non seulement à la reconnaissance, mais aussi à la connaissance et à la compréhension profonde de toutes les voies spirituelles de l'humanité.

C'est cette Vérité Une aux multiples visages qui permet à chacun, selon son niveau de spiritualité, de trouver dans les textes des autres traditions ce qui renforce sa compréhension de sa propre voie. Il est licite à un Juif de lire les Upanishad, à un Bouddhiste de méditer l'Evangile, à un Musulman de reconnaître Dieu dans l'Unicité du Tao, à un Chrétien de contempler le Jésus du Coran, et à un Hindouiste de voir en Lui l'avâtara de Vishnu.

A notre époque où la globalisation permet un accès facile aux textes et la rencontre des fidèles de toutes les religions, encourageons chacun à approfondir sa propre voie, soutenons l'échange et le dialogue entre les traditions, et supportons pour tous les vrais cherchants le droit de chercher parmi les textes sacrés et les pratiques de toutes les traditions, la confirmation et le renforcement de leur propre chemin. Enfin, reconnaissons en tout cherchant sincère, un frère ou une sœur sur le chemin de la Réalité Suprême.



(1) Le bön est la religion de type chamanique qui existait au Tibet avant la première diffusion. Elle existe encore de nos jours, sous diverses formes parfois très proches du bouddhisme.

jeudi 27 février 2014

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Frédérick

Christianismes et âme des peuples




Le christianisme véritable est l'essence de la spiritualité, en ce qu'il est rencontre réelle entre l'être fini et limité que nous sommes, et Celui qui est le visage de Dieu pour l'homme : le Christ. La vie et l'enseignement de Jésus-Christ, homme et Dieu, sont la Voie vers notre ultime destin, qui est de retrouver notre vraie patrie et notre nature originelle.

Très tôt, le message du Christ, la Bonne Nouvelle, propagé parmi les nations (Mt 28,19), s'est teinté de l'âme des peuples où il se répandait : Juifs, Grecs, Égyptiens, Syriens, puis Romains, Galates, Perses, Gaulois, Germains, Slaves, plus récemment Africains, Chinois, Amérindiens... L'histoire du christianisme est faite de ces diversités centrifuges et de la tendance inverse à l'unification et à la centralisation.

Dans le cœur géographique de la Chrétienté – la péninsule européenne et les rives de la Méditerranée – quelques grands courants se sont formés à travers les siècles, adoptant les caractères des différentes civilisations correspondantes.

A l'est, le judéo-christianisme est resté fortement teinté de l'esprit sémitique : prophétisme, attente messianique, pratiques rituelles et alimentaires... Rapidement minoritaires, ses différents rameaux – les Nazoréens, vite fondus dans la Grande Église, les Ebionites et Elkasaïtes – subsistèrent jusqu'au VIII° siècle et influencèrent notablement l'islam naissant, avant de disparaître.

Plus à l'est encore, les églises de l'empire perse sassanide, coupées politiquement de leurs sœurs gréco-romaines, se coloreront de mazdéisme et adopteront la vision duophysite du nestorianisme. L'idéologie mazdéenne, volontiers dualiste, et ce courant chrétien, influenceront tous deux la religion manichéenne aux III°-IV° siècles.

Alexandrie d’Égypte et Antioche, en Syrie, étaient des carrefours cosmopolites où se croisaient de multiples influences culturelles. Les communautés juives y étaient nombreuses, souvent fortement hellénisées, mais on y croisait aussi de nombreux groupes aux idéologies diverses. À Alexandrie, la culture égyptienne finissante hellénisée donna naissance à l'hermétisme, tandis que, dans ces deux villes, prospéraient des communautés gnostiques aux croyances et aux pratiques variées.

Dans le monde grec, le christianisme se confronta rapidement à la tradition philosophique, qui jouissait d'une forte aura. Clément d'Alexandrie puis Origène (précédés dans le cadre du judaïsme par Philon) adaptèrent la pensée platonicienne, puis les Pères de l’Église, notamment les Cappadociens (Basile de Césarée, Grégoire de Naziance, Grégoire de Nysse et surtout Jean Chrysostome). La réflexion sur le Logos platonicien donna naissance à une théologie qui imprègne encore aujourd'hui toute l'église orthodoxe.



L'ouest de l'empire, sous domination romaine, adopta la conception latine de la religion : toute faite de règles et de normes qui doivent être scrupuleusement respectées, hiérarchiquement ordonnée selon les normes de l'ancienne société romaine, l'église latine héritera tout autant de la religio romana, très politique, que du message christique, et son chef deviendra l'héritier du Pontifex maximus antique. C'est dans l'église romaine que la fusion (la confusion) entre religion et idéologie d’État sera la plus profonde, jusqu'à aboutir à la création, au XIII° siècle, de la première police de la pensée : la « Sainte » Inquisition.

Cette version romaine du christianisme s'imposera bien entendu dans toute la moitié occidentale de l'empire, mais avec un succès plus ou moins grand selon les provinces. La Gaule, la Rhénanie, la Grande-Bretagne, puis la Germanie, seront elles aussi imprégnées de la mentalité « locale », à divers degrés. Il y aura toujours « résistance » à la romanisation, que ce soit sous la forme gallicane (Gaule) ou, protestante (Germanie, Grande-Bretagne).

Dans la réduit celtique jamais romanisé (Irlande et Écosse gaéliques), l'église chrétienne est fortement teintée de celtisme. Saint Patrick permet aux filid, les poètes issus de la classe druidique, de transmettre la tradition nationale. L'organisation de l'église est calquée sur celle des tribus et les évêques sont avant tout abbés. La celtisation du christianisme culmine avec l'ordre des Culdees (Serviteurs de Dieu). Cette église celtique ne sera mise au pas romain qu'au XII° siècle, Bernard de Clairvaux n'y étant pas pour rien.

Ainsi, l'orthodoxie est imprégnée de philosophie théologique grecque ; le catholicisme romain conserve le juridisme typiquement latin ; la réforme protestante et ses multiples communautés expriment l'amour germanique des libertés. Qu'en est-il alors de l'âme celte ?

Il me semble que l'âme celte partage avec l'âme germanique l'amour des libertés, mais qu'elle se caractérise en outre par une avide quête intérieure de l'Autre Monde, une quête mouvante et peu figée par les dogmes. Cette tendance s'exprime, dans le christianisme des pays anciennement celtiques, à travers deux caractéristiques majeures : d'une part, une forte aspiration à l'ascèse personnelle, d'où un attrait pour la mystique et un succès incomparable du monachisme. D'autre part, un goût certain pour le mythe, récit du monde imaginal où se déroule la « hiéro-histoire » (H. Corbin), d'où la synthèse celto-chrétienne des légendes arthuriennes et du Graal, la christianisation précoce des légendes et fêtes locales et des contes populaires.

Historiquement, les pays ex-celtiques (îles britanniques, Gaule, Germanie rhénane et méridionale, Helvétie, nord de l'Italie) ont été le cadre privilégié des plus grandes dissidences chrétiennes (je préfère ce terme à celui d'hérésie), au moyen-âge et ensuite. Vaudois, Cathares, mystiques rhénans, béguines, puis la Réforme, Paracelse, les Rose-Croix, l'illuminisme, le martinisme : tous ces mouvements ont éclos ou ont fleuri sur le terreau anciennement celtique, parfois en conflit, parfois en connexion avec le christianisme « officiel ».


C'est cette version-là du christianisme qui me convient, dans le respect et la reconnaissance des autres formes, bien sûr, puisque l'Esprit souffle où il veut.




mercredi 26 février 2014

Exotérisme et ésotérisme dans la perspective de la tradition celtique




Depuis René Guénon (1886-1951), on ne peut plus ignorer la distinction fondamentale, dans le domaine des religions et spiritualités, qu'il a établie entre ésotérisme et exotérisme.
Si on s'accorde généralement à définir l'exotérisme comme l'enseignement qui, dans une tradition donnée, s'adresse au plus grand nombre et est accessible à tous, définir l'ésotérisme s'avère plus délicat. Les opinions à ce sujet divergent.
Pour René Guénon, l'ésotérisme est la Voie Royale, la seule qui mène à la Connaissance. Mais il ne saurait y avoir d'ésotérisme seul, indépendant de tout exotérisme.
Pour J. Fink-Bernard (L'apport spirituel de René Guénon, éd. Dervy, 1996), « L'essence même de l'ésotérisme consiste en une occultation de vérités métaphysiques dont toute une interprétation erronée accélérerait la décadence spirituelle qui caractérise notre époque. Le plus souvent cette occultation s'établit d'elle-même, puisqu'il est de la nature de l'ésotérisme de ne pas se mettre à la portée de tous, ni de se ravaler en cherchant à se faire comprendre de qui en est incapable... ». L'ésotérisme est donc incompatible avec toute forme de prosélytisme.
Prendre cette définition au pied de la lettre pourrait toutefois conduire à séparer deux corps de doctrine, plus ou moins divergentes, et deux groupes de personnes : celles qui seraient destinées à l'ésotérisme, et celles que leur « incapacité à comprendre » condamnerait à rester au niveau extérieur, celui de l'exotérisme.
Jean Borella, dans le cadre d'une réflexion sur cette question au sein du christianisme (Esotérisme guénonien et mystère chrétien, éd. L'Age d'Homme, 1997), tient une position plus nuancée que celle de René Guénon. Pour lui, exotérisme et ésotérisme, loin de désigner deux objets de pensée opposés et complémentaires, représentent en réalité deux modes herméneutiques, deux systèmes d'interprétation d'un troisième terme, qui est le seul objet : le revelatum, c'est-à-dire le contenu objectif de la révélation.
On m'objectera immédiatement avec horreur qu'il n'y a pas de révélation dans les paganismes, et en particulier dans la tradition celtique ; que le concept même de révélation est typique des religions monothéistes. Il n'en est rien. Aucune tradition authentique n'est fondée sur des conceptions humaines. Au contraire, toute tradition authentique est fondée sur un socle sacré, une représentation du sacré qui prend diverses formes, mais dont le point commun est d'être d'origine « non-humaine », c'est-à-dire divine. Il ne peut en être autrement dans la tradition celtique, comme dans les autres traditions indo-européennes, où le mode particulier d'expression de la révélation divine est le mythe.
Le mythe, comme récit symbolique mettant en œuvre les événements du monde imaginal, du monde intermédiaire, de l'Outremonde, n'est pas la création d'un homme ou d'un groupe d'hommes. Les sept Rishis (« voyants ») de l'hindouisme védique, auteurs supposés des Vedas, n'en sont pas les créateurs, mais de simples canaux de transmissions. De même, le récit de la « Fondation du Domaine de Tara » (Textes mythologiques irlandais, trad. Ch.-J. Guyonvarc'h, éd. Ogam-Celticum, 1980) relate comment la structure symbolique et sacrée de l'Irlande, divisée en cinq provinces (4+1), remonte à l'intervention d'un être extraordinaire, Trefuilngid Tre-eochair : « "Je suis venu en vérité", dit-il, "du coucher du soleil et je vais à son lever. Mon nom est Trefuilngid Tre-Eochair". "Pourquoi ce nom t'a-t-il été donné ?", dirent-ils. "Ce n'est pas difficile", dit-il, "parce que c'est moi qui suis la cause du lever du soleil et de son coucher". » « "Que ce soit comme vous l'avez trouvé", dit Fintan, "nous n'irons pas contre les dispositions que Trefuilngid nous a laissées, car c'était un ange de Dieu ou Dieu lui-même" ». Ainsi, toute tradition authentique provient du divin, selon son mode propre, et le mode de la transmission divine en terre celtique, c'est le mythe.

C'est donc notre attitude, notre modèle d'interprétation, notre herméneutique particulière, qui déterminera le caractère exotérique ou ésotérique de toute démarche.

L'herméneutique exotériste, ouverte à tous, publique, consiste en la reproduction des thèmes centraux du mythe, dans le cadre de rites collectifs, unifiant. Religio signifie ici le lien social et sacré à la fois, l'union de la communauté partageant les valeurs et surtout le corpus mythique, afin que la société des hommes soit conforme à l'ordre divin. Rites de saison, rites de passage des moments de la vie, adoration des formes divines, culte, prières collectives, relèvent de cette herméneutique, qui a sa raison d'être.


Il existe cependant une autre approche du mythe sacré, une autre herméneutique. Certains hommes (ce qui inclut évidemment des femmes) ressentent un appel plus profond, qui les pousse à interroger le mythe et à s'interroger soi-même, parce que le mythe résonne en soi-même. L'appel de l'Outremonde est puissant, et s'il n'est pas satisfait, il peut rendre malade. C'est d'un amour qu'il s'agit, l'amour d'Oengus pour Caer Ibormaith, la femme du Síd (« Le rêve d'Oengus », in Textes mythologiques irlandais). L'amant veut rechercher l'aimée. Il y a désir de quête, et cette quête, c'est l'initiation.

En effet, l'herméneutique ésotérique n'est pas ouverte à tous, car la Connaissance ne peut être donnée : c'est au cherchant d'aller la conquérir. Ce chemin est un chemin intérieur (c'est le sens du mot « ésotérique »), et la forêt aventureuse est celle de nos propres profondeurs.

Christian-J. Guyonvarc'h a évoqué en 1993, dans la revue Connaissance des religions, l'initiation celtique. Il est évident que la tradition celtique ancienne a possédé plusieurs voies initiatiques, depuis celles des métiers artisanaux, en passant par l'initiation guerrière, chevaleresque et royale, jusqu'à l'initiation druidique. Il est tout aussi évident que cette dernière n'a pas pu perdurer après l'invasion romaine, la christianisation, et les invasions germaniques. Le cas de l'Irlande est particulier, puisque la conversion de l'île par saint Patrick n'a pas été une rupture radicale avec l'ancienne tradition. La classe des filid, régulée dans le cadre de la nouvelle religion, a continué à transmettre l'essentiel, à savoir le patrimoine mythique, le « revelatum » celtique dont les dieux sont les personnages vivants.

La « résurgence », à partir de 1717, de courants se réclamant du druidisme (lignées de John Toland, Henry Hurle, puis Iolo Morganwg), pose question. Malgré les revendications de l'époque, relayées jusqu'à très récemment, il semble très peu probable qu'une réelle transmission de l'initiation druidique ait pu avoir lieu depuis l'antiquité jusqu'aux tavernes londoniennes où fut fondé le Druid Order. L'absence de références au mythe celtique, au sein de cet « Ordre Druidique », donne à penser que le lien avait réellement été rompu depuis plusieurs siècles. La similitude de milieu avec la franc-maçonnerie moderne naissante – fondée elle aussi dans les tavernes de Londres en 1717 – incite toutefois à s'interroger.

Aujourd'hui, de nombreux groupes s'affirment « druidiques ». Certains proviennent, par diverses filiations, des trois « lignées » du XVIII° siècle. D'autres sont de génération spontanée, ce qui en dit long sur leur connaissance des règles générales de l'initiation. Sans préjuger de l'efficience initiatique de la multitude d'organisations néo-druidiques actuelles, il semble bien qu'on y pratique surtout un exotérisme à base plus ou moins celtique, fondé sur huit fêtes annuelles (dont quatre ne sont pas celtiques), sur l'adoration de divinités dont on ne connaît que peu de choses, car coupées de leur contexte mythique, et sur une « inspiration » d'origine purement individuelle.

Mais si l'exotérisme est l'écorce de l'Arbre sacré, et l'ésotérisme le bois – l'Esprit en étant la sève –, comment ne pas voir que, trop souvent, on n'a affaire qu'à une écorce vide, voire même à une reproduction d'écorce en plastique made in Walt Disney ou Hollywood ? Les générations actuelles ne savent souvent plus faire la différence entre les récits mythiques d'origine supra-humaine, et les romans d'heroic fantasy plus ou moins imités de l’œuvre de J.R.R. Tolkien. Et l'on confond allègrement les personnages sacrés des anciens mythes, avec les elfes, fées, nains, hobbits et autres trolls de la sous-littérature pour adolescents.

Il y a grande urgence, pour ceux qui se réclament aujourd'hui de la tradition celtique, à retrouver l'Esprit qui l'animait dans les temps anciens, qui la fécondait par l'intermédiaire de l'initiation, qu'elle soit artisanale, guerrière et royale, ou sacerdotale. Certains druidisants d'aujourd'hui sont conscients de cette situation et de cette urgence, et parfois sont allés « ailleurs » quérir l'initiation nécessaire. Car l'Esprit est Un, et ses manifestations multiples. La Source est Une, qui irrigue toutes les terres et abonde tous les fleuves.

Toutefois, il faut encore que le parcours initiatique mène réellement là où il doit mener : à l'Esprit qui est Un, à la source de toutes choses, bref, à ce je-ne-sais-quoi qu'on a pris l'habitude d'appeler Dieu, faute de mieux. Et dans cette perspective, le seul « druide » authentique auquel j'accorderai ma confiance s'appelle Christ !


« Is é mo drui a Crist mac Dé ! »




mardi 25 février 2014

Quel christianisme ?




La voie spirituelle que je pratique est le Rite Écossais Rectifié.

Or, cette voie est chrétienne : « Oui, l'Ordre est chrétien ; il doit l'être, et il ne peut admettre dans son sein que des chrétiens ou des hommes bien disposés à le devenir de bonne foi » (Rituel de Maître X).

Comment se définir par rapport au christianisme ? De quel christianisme parle-t-on, et qu'est-ce que cela implique dans la vie du Maçon rectifié ?

Au sens sociologique et culturel, nous vivons dans un pays chrétien. La majorité des Français sont baptisés, ont grandi dans une ambiance chrétienne, à divers degrés cependant. Reconnaissons que nos grands-parents connaissaient globalement bien mieux que nous l'Histoire sainte, les grands moments et les personnages des Écritures, et les dogmes fondamentaux de l'Église. La déchristianisation de la France, enclenchée pendant la Révolution française, a beaucoup progressé dans les esprits, et a laissé la place à une vague morale républicaine et droits-de-l'hommiste, doublée d'une méfiance générale envers toutes les religions. La plupart des « chrétiens » sociologiques d'aujourd'hui ne connaissent pas le christianisme, ses doctrines, son histoire. Est-ce à ces « chrétiens »-là que s'adresse le Rite Écossais Rectifié ?

Ou bien, faut-il être un chrétien de foi et de croyance ? Mais de quelle croyance ?
Les dogmes catholiques, orthodoxes, protestants, mais aussi coptes (monophysites), assyriens (nestoriens), ou encore ariens, vaudois ou cathares, divergent grandement, notamment sur la christologie. Ces dogmes sont le résultat d'une plus ou moins longue évolution, et de fixations à certains moments. Dès l'époque du Christ, les opinions divergeaient sur la nature du message et de la personne même de Jésus. Il faut rappeler que ce n'est qu'à partir du 4ème siècle, trois cents ans après sa mort, qu'une série de Concile a fixé – et figé – les principaux éléments de la doctrine, cristallisant ainsi la majorité des Chrétiens, tout en rejetant dans les marges de l'hérésie ceux qui adoptaient un autre choix. Ainsi, au fur et à mesure des Conciles, des Chrétiens sont déclarés non-chrétiens par l'Église, qui se confond avec l'Empire romain. Certains de ces courants existent encore aujourd'hui : les Nestoriens, écartés au Concile d’Éphèse en 431, constituent les Églises assyrienne et malabare orthodoxe ; les Monophysites, sont représentés par les Églises copte, éthiopienne et arménienne. D'autres encore ont disparu, parfois persécutés par l'Église officielle : Ariens, Vaudois, Cathares. Pourtant, tous se réclamaient de Jésus-Christ. Sont-ils moins chrétiens que les Orthodoxes et les Catholiques romains ?

Il me paraît donc évident que, dès le début, il y eut plusieurs façons d'être chrétien, en terme de croyance.
Qu'en est-il pour le Rite Écossais Rectifié ? Jusqu'au grade de Maître Écossais de Saint-André inclus, en tout cas, aucun dogme n'est imposé au Frère. Le nom même de Jésus-Christ n'est mentionné dans les rituels qu'à la fin du 4ème grade.

Alors, être chrétien dépend-il de la participation aux rites et sacrements ? Bien entendu, tout dépend de la confession chrétienne à laquelle on se rattache.
Le baptême, lui-même, revêt des significations différentes selon les Églises. Baptême des enfants le plus tôt possible pour certains, baptême des adultes après un catéchuménat plus ou moins long pour d'autres, le sens et le processus du baptême a beaucoup varié au cours des siècles, et selon les communautés. Pour les Cathares médiévaux – qui se nommaient eux-mêmes « bons chrétiens » – le baptême d'eau n'était pas le plus important, ayant été pratiqué avant la venue du Christ. Ce dernier aurait pratiqué, selon eux, le baptême d'Esprit, ou de feu, par imposition des mains.
Il en est de même de l'Eucharistie, sacrement dont le sens et la pratique varient considérablement selon les confessions : mémorial de la Cène, Pain de Vie, ou corps réel du Christ ?
Le Rite Écossais Rectifié exige-t-il de ses membres qu'ils fréquentent un culte quelconque, ou qu'ils se rattachent formellement à une des confessions existant actuellement ? Je ne le pense pas.

Dans la Lettre des Compagnons du Dharma (fraternelle des maçons bouddhistes) on peut lire :

« Le RER est chrétien, œcuménique et ésotérique. Il fait référence au christianisme « de l'an 0 », pour reprendre une expression particulièrement heureuse d'un ancien Grand-Maître de la GLTS-O, Christian Lefèvre. Par ésotérique il faut entendre intérieur, par opposition aux rites et aux formes extérieures des différentes confessions. Le christianisme se situe donc au-delà, plutôt qu'en-deça, des conciles, bulles et dogmes, même des écrits des Pères de l'Église et de l'histoire particulière des différentes Églises chrétiennes. Le Rite laisse à chacun ses références confessionnelles spécifiques et il interdit de les évoquer, du moins sous une forme polémique.
Sont maintenant admis au RER [dans certaines structures, note de FM] juifs, musulmans et chrétiens, mais aussi bouddhistes. Il est évidemment exigé que les candidats musulmans ou juifs soient bien informés des spécificités du Rite. Un commentaire obédientiel [à la GLTSO] au discours de Jean-Baptiste Willermoz, lu aux récipiendaires au grade de Maître Écossais de Saint-André, précise que peuvent être admis « tous ceux qui déclarent avoir reçu la Lumière de l'Évangile de Jean, quelles que soient par ailleurs leurs autres croyances ». Autrement dit, tous ceux qui suivent ce qu'il y a d'universel dans le message de Jésus. »

Être chrétien, pour moi, se résume à cette courte définition : c'est reconnaître en Jésus le Christ, c'est-à-dire le Verbe de Dieu manifesté sous la forme d'un homme, qui est alors l'archétype et le modèle de l'Homme parfait, le nouvel Adam. C'est dire que le Christ est « la Vie, la Vérité et la Voie ». Il nous appelle à devenir nous-mêmes « enfants de Dieu », c'est-à-dire hommes nouveaux, nouveaux christs, par la pratique de son enseignement et la méditation sur sa vie.



Il y a ainsi de nombreuses façons d'être chrétien, selon qu'on adhère à telle ou telle christologie. « Il y a beaucoup de demeures dans la maison du Père ».

Être chrétien implique donc pour moi la croyance en un Dieu unique, Principe de toutes choses, le Père, inconnaissable en soi et qui n'est rien de ce qu'on pourrait en dire, selon la tradition apophatique qui existe dans les Églises mais aussi, par ailleurs, dans les autres grandes religions.

Cela implique aussi la croyance en la manifestation de Dieu comme Verbe (« Logos »), à la fois Loi universelle du monde et message aux hommes. C'est le Fils. Le texte fondamental concernant le Logos, dans le contexte chrétien, est le Prologue de l'Évangile de Jean. Le Fils est la Lumière qui illumine tous les hommes (pas seulement les chrétiens)

Enfin, cela implique également la croyance en la présence divine dans le monde, et particulièrement en l'Homme, en chaque homme. Cette présence est l'Esprit Saint, et l'une des façons de désigner le but de la pratique spirituelle, c'est la descente de l'Esprit-Saint sur l'homme, symbolisée par la Pentecôte.

Dieu s'adresse aux hommes, toujours et partout, à toute époque et en tous lieux. Il s'adresse aux hommes dans la langue qui est la leur, dans le cadre du contexte culturel et religieux du moment.

Aussi, je crois que le Verbe de Dieu s'est manifesté aux hommes de nombreuses fois, et de nombreuses manières. Je reconnais donc comme expressions du Verbe de Dieu, et comme traditions d'origine divine, sans confusion ni syncrétisme, les textes et les traditions suivantes :
  • La Bible hébraïque (Ancien Testament), évidemment, et la tradition juive dans son ensemble ;
  • Le Nouveau Testament, bien sûr, mais aussi les textes apocryphes du christianisme, qui témoignent de la multiplicité des traditions rattachées à la personne du Christ Jésus ; l'ensemble des courants du christianisme, orthodoxes ou « hérétiques » sont dignes de respect et d'intérêt ;
mais aussi :
  • Le Coran et les traditions de l'islam, très diverses dans leur approche du texte sacré et de la pratique spirituelle ;
  • Les Vedas, y compris les Upanishads, et les traditions spirituelles orthodoxes de l'hindouisme ;
  • L'enseignement du Bouddha historique Siddharta Gautama Shakyamuni, et les traditions qui en proviennent : bouddhisme theravâda, bouddhisme mahayâna, bouddhisme ch'an et zen, bouddhisme vajrayâna ;
  • Le Tao tö-king de Lao-Tseu et les enseignements du taoïsme chinois ;
  • Les livres de la religion mazdéenne de l'Iran, notamment après la réforme de Zarathustra, prophète inspiré ;
  • Le Guru Granth Sahib, livre sacré des Sikhs...
(liste non exhaustive)

En outre, les traditions disparues des temps anciens ont pu être également inspirées, et receler, encore aujourd'hui, des éléments de réflexion et de méditation pour un disciple du Christ. Je pense notamment aux traditions de l’Égypte ancienne et à l'hermétisme alexandrin ; à certains aspects de la philosophie grecque antique, en particulier Pythagore, Platon et le néo-platonisme ; aux traditions indo-européennes qui nous sont parvenues, plus ou moins déformées, à travers les diverses mythologies.

Mais tout message divin, tout message du Verbe, finit par s'engluer dans le monde humain historique : les ténèbres ne le comprennent pas. Les hommes s'en emparent et finissent par l'instrumentaliser au profit de leurs passions. Toute « religion » au sens large finit par secréter son propre contraire, c'est-à-dire une pétrification du message, et la formation d'une « vérité » dogmatique et enfermante, au lieu d'être un souffle libérateur. La forme est alors surévaluée au détriment du fond. Le littéralisme et l'intégrisme sont les signes de cette pétrification. Toutes les religions connaissent ces dérives. Mais toutes les religions connaissent aussi la réaction inverse, parfois de façon marginale voire clandestine, car combattue, pourchassée et opprimée par l'organisation officielle.

Ainsi, à la limite et de manière un peu provocante, je dirai qu'il y a de vrais disciples du Christ dans toutes les religions, comme il y a aussi des ennemis du Christ dans toutes les religions, y compris dans les Églises qui se disent chrétiennes.

Ce n'est que par l'initiation, au sens large et noble du terme, qu'il est possible de revenir au message initial. Ce n'est que par une herméneutique spirituelle que le message reste vivant et opérant. Le message divin a revêtu une forme qui est à la fois voile et dévoilement. Il faut pénétrer le sens caché des textes, en le vivant réellement, intérieurement. Le vrai Chrétien est alors celui qui, à l'issue de son chemin initiatique, a rencontré le Christ qui est en lui, celui pour qui « ce n'est plus lui qui vit, c'est le Christ qui vit en lui ».

Au final, je pense qu'il n'appartient à personne de juger de la conformité de chacun au message du Christ, au « plus pur esprit du christianisme ». Dieu seul juge les reins et les cœurs. Mais c'est à ses fruits qu'on juge l'arbre, et le fruit du christianisme, c'est l'Amour, cet Agapé qu'on a mal traduit par « Charité », cet Amour qui n'est pas préférence, mais s'adresse indistinctement à tous les hommes, et même à toutes les créatures.



Mais, bien sûr, ceci n'est que mon opinion personnelle. Elle est donc susceptible d'évoluer...



dimanche 23 février 2014

La littérature galloise et arthurienne



          J'ai présenté brièvement la littérature irlandaise dans mon article "Isé mo drui a Crist mac Dé".

La littérature galloise est représentée principalement par les Quatre Branches du Mabinogi, et les contes attenants. Écrits en moyen-gallois, on les trouve dans deux manuscrits : le Livre Blanc de Rhydderch (entre 1380 et 1410) et le Livre Rouge de Hergest (environ 1350), mais l'archaïsme des thèmes renvoie à une longue transmission orale.
Mabinogi de Pwyll, prince de Dyfed :
Ce conte a pour sujets l'origine, le fondement et la légitimité de la royauté. Pwyll passe un contrat avec le roi de l'Autre Monde, ce qui en indique clairement l'origine divine. Il épouse la déesse Rhiannon, la souveraineté étant un concept féminin. Justice et générosité du roi sont deux qualités indispensables à la fonction.

Mabinogi de Branwen :
Il traite des relations difficiles entre les nations. La guerre est le thème central, et on y glorifie le guerrier héroïque. Bran est un géant dont le nom signifie « corbeau ». L'histoire de Matholwch décrit trois infractions aux trois fonctions indo-européennes : violation d'un traité de paix (fonction juridique), piège contraire à l'éthique (fonction guerrière) ; disgrâce de Branwen (fonction de production).

Mabinogi de Manawydan, fils de Llyr :
Selon le schéma dumézilien, ce récit décrit la troisième fonction celtique, celle des artisans-producteurs et des agriculteurs-éleveurs. Suite à une malédiction, Pryderi fils de Pwyll et ses compagnons sont obligés de pratiquer divers métiers, et de rompre l'ensorcellement du royaume.

Mabinogi de Math, fils de Mathonwy :
Plus spécialement consacré à la classe sacerdotale, ce quatrième conte met en scène Math, roi du Gwynedd, et son neveu Gwydion, ainsi que Llew Llaw Gyffes, équivalent gallois du dieu Lug.


Autres contes et romans :
Breuddwyd Macsen Wledig (Le Rêve de Maxen) ;
Breuddwyd Rhonabwy (Le Songe de Rhonabwy) ;
Lludd a Llefelys ;
Culhwch et Olwen ;
Hanes Taliesin (Histoire de Taliesin) ;
Peredur ab Evrawc (version galloise du Perceval de Chrétien de Troyes) ;
Gereint ac Enid ;
Owein.

L'ensemble de ces textes a été traduit, publié et annoté par le linguiste Pierre-Yves Lambert, Les Quatre branches du Mabinogi et autres contes gallois, éd. Gallimard, 1993 .



Textes de la littérature arthurienne

Le « Que sais-je ? » de Thierry Delcourt sur la littérature arthurienne mentionne 89 récits médiévaux. Voici les principaux :

Les précurseurs :
  • Nennius, Historia Brittonum, vers 800
  • Guillaume de Malmesbury, Gesta Regum Anglorum, vers 1100
  • Geoffroy de Monmouth, Prophetiae Merlini, 1134
  • Geoffroy de Monmouth, Historia Regum Britanniae, vers 1135
  • Geoffroy de Monmouth, Vita Merlini, vers 1150
  • Wace, Roman de Brut, 1155
  • Marie de France, Lais, vers 1160
L’âge d’or de la littérature arthurienne :
     Chrétien de Troyes :
  • Erec et Enide, vers 1170
  • Yvain, le Chevalier au Lion, 1177-1181
  • Lancelot, le Chevalier de la Charrette, 1177-1181
  • Perceval, le Conte du Graal, 1181-1190
  • Béroul, Tristan, vers 1180
  • Ulrich von Zatzikhoven, Lanzelet, 1194-1205
  • Le Livre Caradoc (Première Continuation du Conte du Graal), première version, vers 1200
  • Le roman de l’Estoire dou Graal, vers 1200
  • Robert de Boron :
  • Merlin en vers, vers 1200
  • Perceval en prose, vers 1210
  • Wolfram von Eschenbach :
  • Parzifal, vers 1205
  • Titurel
  • Wauchier de Denain (?), Deuxième Continuation du Conte du Graal, 1205-1210
  • Perlesvaus, 1200-1210
  • Heinrich von dem Türlin, Diu Crône, vers 1220
  • Lancelot propre (Vulgate), 1220-1225
  • Estoire del Saint Graal, 1220-1230
  • Queste del Saint Graal, 1220-1230
  • Troisième et Quatrième Continuations du Conte du Graal, vers 1230
  • Sir Gawain and the Green Knight, vers 1375
  • Thomas Malory, La Morte Darthur, avant 1471
Recueils :
  • Danielle Régnier-Bohler : La légende arthurienne, éd. Robert Laffont, coll. Bouquins, 1989
  • Michel Stanesco : La légende du Graal dans les littératures européennes, éd. Livre de Poche, 2006




Ouvrages contemporains sur la littérature arthurienne :
Thierry Delcourt :
  • La Littérature arthurienne, PUF, Que Sais-Je ?, n° 3578
Emma Jung et Marie-Louise von Frantz :
  • La légende du Graal, éd. Albin Michel, 1988
Jean-François Lecompte :
  • La symbolique du Graal, Géométrie du Conte du Graal de Chrétien de Troyes, éd. Edite, 2008
Paul-Georges Sansonetti :
  • Chevalerie du Graal et Lumière de Gloire, éd. Exèdre, 2002
  • Graal et Alchimie, éd. L’Île Verte – Berg International, 1982
Dominique Viseux :

  • L'initiation chevaleresque dans la Légende arthurienne, éd. Dervy, 1980

samedi 22 février 2014

La Tradition celtique : Bibliographie




Beaucoup d'inepties de type New Age sont publiées sur les Celtes, et il faut faire preuve de discernement. La littérature « néo-druidique » mêle le pire et le presque bon. Les études archéologiques sont souvent frileuses en terme d'interprétation. Les études globales sont rares, voire inexistantes, qui feraient preuve de sérieux dans le choix des sources, et d'ouverture dans l'interprétation, ce qui nécessite la connaissance des autres traditions, et aussi une démarche intérieure personnelle.
Je vous propose une sélection, toute subjective, d'ouvrages sur les Celtes, ainsi qu'une présentation des littératures irlandaise, galloise et arthurienne.

Généralités :

Sur les religions :
L'œuvre de Mircea Eliade, notamment :
  • Le sacré et le profane, éd. Gallimard Folio, 1965
  • Traité d’Histoire des religions, éd. Payot, 1949
  • Aspects du mythe, éd. Gallimard Folio, 1963
  • Initiation, rites, sociétés secrètes, éd. Gallimard Folio, 1959

Sur les Indo-Européens :
L'œuvre de Georges Dumézil, notamment :
  • Les dieux souverains des Indo-Européens, éd. Gallimard, 1986
  • Mythes et Epopée I, II et III, éd. Gallimard, 1995
  • Heur et malheur du guerrier, éd. Champs-Flammarion, 1985
  • Les dieux souverains des Indo-Européens, éd. Gallimard, 1986
Bernard Sergent :
  • Les Indo-Européens. Histoire, langues, mythes, éd. Payot, 1995
Marco Garcia Quintela :
  • Dumézil, une introduction, éd. Armeline, 2001
Jean Haudry :
  • L’Indo-européen, PUF Que Sais-Je ?, 1979-1984
  • Les Indo-Européens, PUF Que Sais-Je ?, 1981-1992

Sur les Celtes :
Le Pr Christian-J. Guyonvarc'h et son épouse Françoise Le Roux, enseignants à l'université de Rennes II, ont renouvelé les études celtiques dans les années 60 à 90. Dans la revue Ogam, comme dans leurs livres, ils ont défendu une vision particulière du sujet, en allant chercher les sources les plus fiables, et en replaçant le monde celtique dans le contexte indo-européen – ce qui n'était pas évident à l'époque.

Ch.-J. Guyonvarc'h et F. Le Roux :
  • Les druides, éd. Ouest-France Universités, 1986
  • La civilisation celtique, éd. Payot, 1995
  • La société celtique, éd. Ouest-France Universités, 1991
  • Les fêtes celtiques, éd. Ouest-France Universités, 1995
  • Morrigan-Bodb-Macha. La Souveraineté guerrière de l’Irlande, éd. Ogam-Celticum, 1983
  • La légende de la ville d’Is, éd. Ouest-France, 2000
Ch.-J. Guyonvarc'h seul :
  • Magie, médecine et divination chez les Celtes, éd. Payot, 1997
  • La Razzia des Vaches de Cooley, Gallimard, 1994 (texte épique du cycle d'Ulster)
  • Le Dialogue des Deux Sages, éd. Payot, 1999 (seul texte authentiquement druidique qui nous soit parvenu)
  • Textes mythologiques irlandais, éd. Ogam-Celticum, 1980 (traduction française de nombreux textes du cycle mythologique)

Autres auteurs scientifiquement fiables :
Venceslas Kruta :
  • Les Celtes, histoire et dictionnaire, éd. Robert Laffont, coll. Bouquins, 2000
Barry Cunliffe :
  • Les Celtes, éd. Infolio, 2006
Olivier Buchsenschutz :
  • Les Celtes, éd. Armand Collin, 2007
Christiane Eluère :
  • L'Europe des Celtes, éd. Découvertes Gallimard

Histoire et archéologie :

Les éditions Errance publient de nombreux ouvrages scientifiques de qualité sur l'archéologie celtique (Stefan Fichtl, Jean-Louis Brunaux, Olivier Buchsenschutz...)
Albert Grenier :
  • Les Gaulois, éd. Payot, 1970-1994
Myles Dillon, Nora Chadwick, Ch.-J. Guyonvarc'h et F. Le Roux :
  • Les royaumes celtiques, éd. Armeline, 2001
Henri Hubert :
  • Les Celtes depuis l’époque de La Tène et la civilisation celtique, éd. Albin Michel, 1927-1968
Emile Thévenot :
  • Histoire des Gaulois, PUF, Que Sais-Je ? 1946-1971


Religion :

Outre les ouvrages de Christian-J. Guyonvarc'h et Françoise Le Roux, lire :
Thierry Jolif :
  • B.A.-BA de la Mythologie celtique, éd. Pardès, 2000
  • B.A.-BA de la Tradition celtique, éd. Pardès, 2001
  • B.A.-BA des Symboles celtiques, éd. Pardès, 2004
  • B.A.-BA des Druides, éd. Pardès, 2006
Jean-Louis Brunaux :
  • Les druides, éd. du Seuil, 2006
Claude Sterckx :
  • Mythologie du monde celte, éd. Marabout, 2009
Patrice Lajoye :
  • Des dieux gaulois – Petits essais de mythologie, éd. Archaeolingua, 2008


Néo-druidisme :

Robert Ambelain :
  • Les traditions celtiques. Doctrine initiatique de l’Occident, éd. Dangles, 1977
Régis Blanchet (franc-maçon pratiquant le RER au GodF, décédé en 2005) :
  • Entretiens avec un druide nommé Gwenc’hlan, éd. du Prieuré, 1994
Gwenc'hlan Le Scouezec (Grand-Druide de Bretagne) :
  • Bretagne, terre sacrée. Un ésotérisme celtique, éd. Beltan, 1986
Michel Raoult :
  • Les Druides. Les sociétés initiatiques celtiques contemporaines, éd. du Rocher, 1992-1997
Celui du Pays de l'Ours (Jean-Claude Capelli) :
  • Entre l'if et le bouleau. La voie du druide ;
  • Entre Soleil et Lune. La spirale du druide. Le cycle des fêtes druidiques ;
  • Des origines païennes de la franc-maçonnerie. Tome 1 : des origines druidiques ;
  • Les Quatre Talismans du druide. De la royauté celtique à la royauté intérieure ;
  • Entre le cygne et l'ours. Le Centre sacré des Gaules ;
  • Les onze merveilles du druide : la Veillée de Fingen.


Christianisme celtique :

Louis Gougaud :
  • Les chrétientés celtiques, éd. Armeline, 1995

Auteurs antiques :

Jules César :
  • La guerre des Gaules, nombreuses éditions
De nombreux auteurs ont mentionné les Celtes et leurs croyances dans leurs ouvrages. Citons pêle-mêle :
  • Pline, Histoire Naturelle, XVI, 249-251 et XXIX, 52-54 et XXXIV, 45
  • Lucain : La guerre civile (Pharsale), I, 441-446
  • Scholies bernoises sur Lucain, La guerre civile
  • Apollonios de Rhodes, Argonautiques, IV, 611
  • Dion Cassius: Histoire romaine, LXXVIII, 15, 6
  • Ausone: Commemoratio, IV et X
  • Ammien Marcellin, Histoires, XXVII, 4
  • Polybe, Histoires, II, 32, 5-6
  • Justin, Histoires philippiques extraites de Trogue Pompée, XLIII, 5
  • Tacite, Germanie, 45
  • Tacite, Annales, XIV, 29-32
  • Arrien, Cynégétique ou de la chasse, XXXIII, D'une loi des Celtes et d'un trésor collectif formé par eux en l'honneur d'Artémis
  • Lucien de Samosate, Discours, Hercule, 1-7
  • Strabon, Géographie, IV, IV, 4
  • Pomponius Mela, Chorographie, V, 2, 18
  • Diodore de Sicile, Bibliothèque historique, V, 31
  • Cicéron, De la divination, I, 41
  • Diogène Laërce: Vies de philosophes illustres, prologue, 1 et 6
  • Clément d'Alexandrie, Stromates, I, XV, 70
  • Posidonios d'Apamée ou de Rhodes, Histoires, XXIII