samedi 22 février 2014

La Tradition celtique (partie 7 - Son esprit)



Même si revendiquer le titre de « druide » est à mes yeux fantaisiste aujourd'hui, en l'absence de toute filiation réelle, et parce que la société celtique traditionnelle a disparu, il reste que la tradition celtique possède une valeur symbolique et spirituelle immense, et qu'elle peut, à mon avis, nourrir une spiritualité authentique. Encore faut-il étudier sérieusement les sources authentiques, les textes irlandais et gallois, s'en imprégner et les méditer en profondeur, et avoir conscience de son universalité et de sa parenté avec les autres formes de spiritualités, afin de ne pas en faire une nouvelle idolâtrie identitaire. La tradition celtique peut, à mon sens, nourrir une spiritualité moderne. C'est l'Esprit de cette tradition.

Dans la franc-maçonnerie du Rite Écossais Rectifié, le schéma fondamental est celui du Temple. Temple universel, qui est l'Univers ; Temple particulier, qui est l'Homme ; et, entre les deux, Temple général, dont le type de base est le Temple de Salomon et la Loge. C'est sur les correspondances entre ces trois niveaux du Temple que joue ce Rite pour faire progresser le franc-maçon sur le chemin de l'initiation.
Si le modèle spirituel de la tradition judéo-chrétienne est ainsi le Temple de Salomon, paradigme de tout culte vrai, celui de la tradition celtique réside dans l'organisation géographique sacrée du monde celtique. Pour employer encore une fois le langage martinésien, le « temple général » est constitué par la terre celtique, partagée en royaumes orientés autour du centre sacré, synthèse de tout l'espace, où se réunit ce qui est épars.

Les Celtes possédaient des sanctuaires et des enclos sacrés, où se déroulaient des cérémonies. Ils étaient généralement situés dans des lieux déserts, et notamment dans la forêt, lieu sauvage où les hommes rencontraient le monde des dieux. Mais dans le cadre celtique, c'est la nation, le royaume, qui jouait le rôle de Temple général. L'Irlande, par exemple, est divisée en quatre provinces auxquelles on attribue quatre « qualités » (à l'ouest la connaissance, au nord la guerre, à l'est la richesse, au sud la musique), plus une province centrale qui est constituée d'un morceau de chacune des quatre, et où se trouvent les grands sanctuaires. Ce schéma rituel se retrouve dans la Gaule antique, avec le « locus consecratus » situé chez les Carnutes, au centre de la Gaule, selon César.
Les mythes racontent les aventures des dieux et des hommes susceptibles de les rencontrer dans le monde intermédiaire, le monde imaginal du Sid. En Gaule, une des fonctions druidiques s'appelait « gutuater », ce qui pourrait signifier « père de la parole ». C'est par la maitrise de la parole et de la poésie que les druides et leurs héritiers de l'Irlande chrétienne, les filid, progressaient dans la hiérarchie spirituelle, dont nous connaissons les 7 ou 9 degrés. La récitation des mythes et des récits traditionnels et leur transmission fidèle, est une fonction fondamentale, qui opère la transformation intérieure de ceux qui récitent comme de ceux qui écoutent.
Dans la partie britonnique du monde celtique, c'est-à-dire principalement au Pays-de-Galles et en Bretagne, cette fonction est assurée par les bardes. Les concours de poésie bardique ont lieu au Pays-de-Galles depuis le Moyen-Âge jusqu'à nos jours. C'est d'ailleurs dans ce milieu que le Gallois Iolo Morganwg constituera en 1792 son ordre néo-druidique, la Gorsedd, qui existe encore aujourd'hui.
Cette fonction initiatique des récits gallois et bretons sera reprise après l'an mil par les poètes, dans la « Matière de Bretagne » : Arthur, Merlin, les chevaliers de la Table Ronde et surtout la Quête du saint Graal rattachent la tradition celtique à notre tradition chrétienne. Les mythes des anciens druides se fondent dans le mythe chrétien, le chaudron d'abondance devient coupe de la Cène, le breuvage d'immortalité devient sang du Christ et la lance du dieu Lug, celle du soldat Longin. L'universalité de l'Un sans forme, derrière toutes les formes, permet cette transposition d'une tradition à une autre, parce que toutes les traditions authentiques se rejoignent dans leur centre qui est unique.





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