L'Âme
celtique, c'est sa religion. Les Celtes ne partagent pas seulement
une langue, mais aussi une culture, une civilisation, une vision du
monde, du sacré, de la Souveraineté politique, et de la société.
Bien sûr, cette culture a varié selon les lieux et les époques, en
raison des substrats pré-celtiques différents, d’influences
diverses et de l’évolution propre à chaque communauté celtique.
En Gaule, par exemple, les conceptions romaines avaient pénétré
bien avant les légions de César, et Vercingétorix était
vraisemblablement membre d’une faction traditionaliste proche des
druides. Mais nous possédons assez de documents pour connaître les
conceptions traditionnelles celtiques.
Les
sources de nos connaissances sont de quatre ordres :
D’une
part, les données fournies par l’archéologie.
Celles-ci sont de plus en plus nombreuses et précises, et elles
viennent parfois remettre en question nos idées reçues sur les
Celtes, surtout dans le domaine matériel, mais aussi sur les rites
et les pratiques religieuses. Sur cet aspect, je ne peux que
conseiller à tousde visiter le Musée Européen de la
Civilisation Celtique, situé au pied du mont Beuvray, dans le
Morvan. Contrairement aux civilisations méditerranéennes (Égypte,
Grèce, Rome...), l'architecture celtique n'est pas principalement
basée sur la pierre, mais sur le bois. Mais là où elle excelle,
c'est dans la métallurgie : armes, bijoux, monnaies, sont d'un
haut niveau technique, et servent de support à des représentations
symboliques riches et variées.
Les
auteurs
classiques,
grecs et latins, ont beaucoup écrit sur les Celtes. De Pline à
César, en passant par Diodore de Sicile, Plutarque et Tite Live, de
nombreuses descriptions géographiques, récits historiques,
anecdotes et comptes-rendus de voyage nous sont parvenus. Bien sûr,
il faut faire la part de l’interprétation grecque ou romaine, mais
certaines indications sont très importantes pour notre connaissance
de la tradition celtique.
Les
textes irlandais
nous sont encore plus précieux. L’Irlande offre en effet la
particularité, je l’ai dit, de n’avoir jamais été romanisée.
La
société traditionnelle s'y est maintenue intacte jusqu'à l'arrivée
de saint Patrick, au V° siècle. A la christianisation, beaucoup de
membres de la classe intellectuelle des druides se sont convertis à
la nouvelle foi, et ont certainement constitué les cadres de
l'Église chrétienne. Ils ont cherché ensuite, non pas à faire
table rase des anciennes traditions, mais à les adapter à la
nouvelle. Ce qui choquait trop la foi chrétienne fut interdit, mais
des pans entiers des vieilles croyances furent superficiellement
christianisés, de manière à conjuguer la " Loi de Nature "
aux récits bibliques, comme l'Ancien Testament annonce l'Évangile.
Dès le VII° siècle, et peut-être avant, les vieux récits ont été
mis par écrit, principalement par des moines. Ils ont également été
transmis oralement par les poètes (en gaélique : filid),
qui étaient les héritiers d’une catégorie de druides
spécialisés, et autorisés par saint Patrick à transmettre leur
savoir traditionnel. La littérature irlandaise comprend des dizaines
de récits mythiques ou épiques, des manuels de poésie, des annales
historiques remplies d’anciens mythes, des manuels de droit
traditionnel. Elle a été peu étudiée, à cause de la difficulté
à traduire l’irlandais médiéval, mais elle sort peu à peu de
l’ombre grâce au travail de quelques passionnés, surtout dans le
monde anglophone.
La
littérature
galloise et arthurienne,
enfin, présente aussi un grand intérêt. Bien qu’elle soit
beaucoup plus christianisée que la littérature irlandaise, elle
présente de nombreux aspects mythiques d’origine celtique. C’est
le cas des Mabinogion, sorte de contes merveilleux gallois, mais
aussi du cycle arthurien, passé en France au XII° siècle avec
Chrétien de Troyes puis répandu dans toute l’Europe médiévale.
La littérature arthurienne fait le lien avec la tradition
chrétienne, et les symboles celtiques fondamentaux sont
réinterprétés à la lumière de la foi chrétienne.
Nos
quatre sources, archéologie, textes gréco-latins, textes irlandais
et littérature galloise et arthurienne, nous permettent de nous
faire une idée assez riche de la tradition celtique, même si des
aspects entiers nous manquent et nous manqueront sans doute toujours,
comme par exemple le détail des rites religieux ou initiatiques, et
les conceptions métaphysiques exactes des druides.
(à suivre...)
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